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La loi au service des violations des droits de l’homme (4)

08-05-2012

La loi au service des violations des droits de l’homme (4)

Par Michel Tran Duc

Discours prononcé le 13 mars 2012 par Michel Tran Duc au 4ème Sommet de Genève sur les Droits de l’Homme et la Démocratie.


Les droits de la défense sont bafoués

Le Code vietnamien de la Procédure Pénale regorge de bonnes intentions comme la présomption d’innocence, l’égalité de tous les citoyens devant la loi, la garantie de l’intégrité physique et morale des personnes mises en examen, l’impartialité des enquêteurs, le respect des droits de la défense, etc. Mais dans les faits, qu’en est-il ?

Par exemple, l’article 48 de ce Code dit que les personnes mises en détention provisoire doivent pouvoir connaître la raison de leur détention. Les rédacteurs de cet article ont seulement omis de préciser le délai car dans le cas du professeur de mathématique Pham Minh Hoang, il n’a su la raison de sa détention qu’après avoir passé plusieurs semaines derrière les barreaux en détention provisoire. De plus, tous les entretiens que Pham Minh Hoang passés avec son avocat ont été filmés par des policiers qui ne perdaient pas une miette des échanges.

Au Vietnam, l’avocat ne peut rencontrer son client et accéder au dossier qu’une fois l’enquête terminée, ce qui peut prendre jusqu’à un an. C’est une durée très très longue où le prévenu est seul face à la Sécurité Publique, subissant toutes sortes de pressions pour avouer tout ce que les autorités veulent lui faire avouer.

Mais il y a pire encore. En mai 2011, les sept militants des droits fonciers de Ben Tre n’ont pu rencontrer leur avocat qu’une semaine avant le procès, alors qu’ils étaient sous le coup de l’article 79. Comment est-ce qu’un avocat, si bon soit-il, peut préparer la défense de son client en une semaine alors que celui-ci risque la peine de mort ?

Des procès expéditifs

Aucun dissident politique n’a jamais été acquitté par un tribunal vietnamien.

Les procès politiques au Vietnam durent moins d’une journée, le plus souvent ils ne prennent que deux ou trois heures. Le procès est en fait un débat durant lequel les autorités annoncent la sentence qui a été prédéterminée. Avant la procédure, la Sécurité Publique, le Parquet et les juges se réunissent et décident à l’avance du verdict et de la sentence. L’audience dans le tribunal ne sert à rien d’autre qu’à officialiser la décision prise plus tôt. En conséquence, les avocats de la défense sont cantonnés à un rôle de faire-valoir. Leurs arguments, leur plaidoirie n’a aucune influence sur la décision du juge. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant qu’aucun dissident politique n’a jamais été acquitté par un tribunal vietnamien.

Les observateurs étrangers sont rarement autorisés à assister aux procès. Dans certains cas très médiatisés, les diplomates et les journalistes étrangers sont parfois autorisés à observer les débats au travers d’un moniteur de télévision situés en-dehors de la salle. Et bien que les procès soient publics, il arrive fréquemment que les supporters, même la famille, des personnes jugés ne puissent pas accéder au tribunal. Cela a été le cas en août 2011 où la mère de Pham Minh Hoang n’avait pas pu assister au procès de son fils car soi-disant la salle était déjà pleine.

Les opposants politiques jugés ont possibilité de faire appel mais généralement, la sentence est confirmée ou bien elle diminue seulement de quelques mois s’il y a eu des pressions internationales. En revanche, le pourvoi en cassation est un privilège réservé au parquet et le cas ne s’est jamais présenté avec les procès politiques, puisque les juges et le parquet ne sont jamais en désaccord.

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