Bill Cosby ou Stéphane Hessel ?

Bill Cosby ou Stéphane Hessel ?

Par Romain Landry             

Ces deux  personnages ont une perception différente de la justice, du partage et des différences.

Tout récemment, le mouvement Occupons Wall Street est devenu le pendant progressiste de la droite ultraconservatrice du « Tea Party », ce regroupement politique de la droite Républicaine, qui  représente un pour cent de la frange la plus cupide et la plus corrompue de la société américaine.

Le comédien américain, Bill Cosby, est un digne représentant de  ces éléments les plus ultraconservateurs aux États-Unis. Voici d’ailleurs en résumé son message :

Bill Cosby, 74 ans

J’ai 74 ans et je suis fatigué de :

• partager mes revenus avec ceux qui sont trop paresseux pour travailler;
• me faire dire que  l’Islam est une religion de paix alors que la charia préconise le contraire;
• me faire dire qu’il faut être tolérant envers les autres cultures alors que les pays arabes et musulmans prêchent la violence et la haine dans nos pays;
• devoir réduire mon niveau de vie  pour combattre le supposé réchauffement climatique;
• voir l’apparition de ces cliniques antidrogues ─ dites thérapies de remplacement à la méthadone ─ qui permettent à la clientèle, supposément malade, de continuer à se droguer à volonté;
• voir se profiler dans notre société certains membres qui prétendent s’excuser d’avoir fait une erreur, alors que leur seul problème, c’est d’avoir été pris la main dans le sac;
• ces gens qui blâment le gouvernement ou les riches pour tous leurs malheurs, alors qu’ils refusent tout simplement d’assumer leur vie et de leurs actions;
• mauditement fatigué de voir tout ce que ce monde va faire subir à ma petite-fille et à ses enfants. Je remercie néanmoins Dieu d’être près de la fin plutôt qu’à mes débuts.

Des individus comme Bill Cosby et le « Tea Party » sont dangereux parce qu’ils créent des idéologies, des  dogmes et des préjugés. Selon Boris Cyrulnik, c’est ce qui se passe face au  racisme humain, où l’on se fait de l’autre un récit effrayant : Les Noirs, vous savez comment ils son! Et les Arabes et les Juifs, n’en parlons pas! Alors, de dire Cyrulnik, ces personnes se font  un récit totalement cohérent qui n’a plus aucun rapport avec le réel. Et elles éprouvent alors un sentiment provoqué par leur propre récit. L’autre, elles ne le connaissent pas, mais elles se soumettent à l’idée qu’elles s’en font, ce qui leur permet de l’exterminer, le tuer, le chasser de la planète sans aucun sentiment de culpabilité. Le délire…C’est arrivé chez un peuple très cultivé,  l’Allemagne.

Heureusement, la planète recèle d’individus tout autres, tels que Stéphane Hessel, dont je résume brièvement le message intitulé Indignez-vous.

Stéphane Hessel, 93 ans

J’ai 93 ans, et ce qui m’indigne, c’est :

• l’écart entre les plus pauvres et les plus riches, qui n’a jamais été aussi important… la course à l’argent et à  la compétition étant devenue excessive;
• les grandes entreprises et les établissements financiers qui ont pris la direction de l’économie;
• l’intérêt particulier qui prime sur l’intérêt général; désormais, le pouvoir de l’argent empêche le juste partage des richesses créées par le monde du travail;

• le manque de liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l’égard de l’État, des puissances financières et des influences étrangères;
• les conquêtes sociales qui sont aujourd’hui remises en cause;
• l’idée mensongère véhiculée par l’État et selon laquelle on manque d’argent. Le pouvoir de l’argent n’a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l’État;
• les banques qui se préoccupent surtout des dividendes et des salaires excessifs de leurs dirigeants. Et j’ajoute : les bonis payés à ses dirigeants (NDLT);
  • le traitement qu’Israël fait subir au peuple palestinien. Notez : Hessel est lui-même un membre de la communauté juive (NDLT);
  • l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie;
  • l’indifférence, qui est la pire des attitudes. Répondre Je n’y peux rien, je me débrouille est inacceptable. L’indignation devrait plutôt déboucher sur l’engagement.

Les grands de l’humanité :

1. L’immense écart entre les très pauvres et les très riches ne cesse de se creuser; les très pauvres dans le monde gagnent à peine deux dollars par jour.

1. Les droits de l’homme et l’état de la planète : Hessel était associé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée par l’organisation des Nations Unies, le 10 décembre 19948 à Paris. L’article 22 de la Déclaration dit que « Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à  la Sécurité sociale, ce qui comprend les droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité. »

Les mouvements sociaux tels que l’Association pour la taxation des transactions financières (ATTAC), la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et Amnesty sont agissants et performants.

La non-violence, le chemin que nous devons apprendre à suivre

Hessel croit que l’avenir appartient à la non-violence, à la conciliation des cultures différentes, et que c’est par cette voie que l’humanité franchira sa prochaine étape.

L’espoir, au dire de Hessel, malgré les barbaries du 21e siècle, a toujours été une des forces dominantes des révolutions et des insurrections, et je ressens encore l’espoir comme ma conception de l’avenir.

Et, poursuit-il, le message d’un Mandela ou d’un Martin Luther King trouve toute sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et le totalitarisme conquérant.

Pour une insurrection pacifique Selon Hessel, la  pensée productiviste portée par l’Occident a entraîné le monde dans une crise dont il faut sortir par une rupture radicale avec la fuite en avant du « toujours plus », dans le domaine financier, mais aussi dans le domaine des sciences et des techniques.

Il est grand temps que prévale le souci d’éthique, de justice et d’équilibre durable. Certes, on a réalisé des progrès considérables :

• la décolonisation;
• la fin de l’apartheid;
• la destruction de l’empire soviétique;
• la chute du Mur de Berlin.

Par contre, la première décennie du 21^e siècle a été une période de recul qui s’explique ainsi :

• la présidence de George Bush;
• les événements du 11 septembre;
• l’intervention américaine en Irak;
• la crise économique de 2008;
• le peu de résultat du sommet de Copenhague contre le réchauffement climatique.

Malgré tout cela, il faut continuer à espérer. La décennie quatre-vingt-dix avait enregistré quelques succès, notamment :

• la conférence de Rio sur l’environnement;
• la conférence de Pékin sur les femmes;
• l’adoption en septembre 2000, par 191 pays, des « Huit objectifs du millénaire pour le développement », c’est-à-dire de réduire de moitié la pauvreté dans le monde d’ici 2015.

« L’injustice me met en colère et m’indigne, avoue Stéphane Hessel, et je profite de cette tribune pour appeler à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. »

À ceux et celles qui feront le 21^e siècle, nous disons avec affection : Créer, c’est résister, et résister, c’est créer.