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La CRE garde le cap; libéraux et péquistes s’unissent de nouveau

18-10-2011

La CRE garde le cap; libéraux et péquistes s’unissent de nouveau

Par Paul Cliche

Libérée de sa tutelle le 1er juillet dernier, la CRE a déposé un rapport révisé à l’Assemblée nationale lors de la reprise de la session en septembre. Ce rapport prévoyait toujours l’abolition des trois circonscriptions de l’Est du Québec. L’organisme doit annoncer cette semaine sa décision sur la délimitation de la nouvelle carte. Mais, de leur côté, le gouvernement libéral et l’opposition péquiste viennent de s’entendre pour faire adopter une autre loi d’exception afin de préserver les trois circonscriptions rurales menacées d’abolition. Il se peut que l’Assemblée nationale en débatte la semaine prochaine.

 

Ainsi, il semble bien que l’imposition de cette loi d’exception mettra fin  à une saga peu reluisante qui a duré plus de trois ans et demi alors que le processus de révision aurait normalement dû prendre moins d’un an. Cet abus de pouvoir a sérieusement ébranlé la CRE, une institution créée en 1979 par le gouvernement Lévesque, qui  a servi de modèle dans d’autres pays. Et de surcroît, ce sont ceux-là mêmes qui auraient dû la protéger qui se sont livrés à la curée. Un tel comportement n’est certes pas la bonne manière à adopter pour diminuer le désengagement politique des citoyens  et leur cynisme envers les politiciens?

 

Au lieu d’améliorer les institutions démocratiques mises en place durant la Révolution tranquille et même d’instaurer de nouvelles réformes, comme un scrutin proportionnel permettant à chaque vote de compter, les héritiers politiques de René Lévesque et de Jean Lesage s’évertuent plutôt à  racornir celles qui existent. Force est de constater que la société québécoise est bel et bien bloquée, comme l’illustre crûment la pièce de théâtre Tout ça m’assassine de l’auteur et metteur en scène Dominic Champagne!

 

Quant à la CRE, les libéraux et les péquistes seraient moins hypocrites s’ils l’abolissaient. Car chaque fois qu’ils ne seront pas d’accord avec une de ses décisions à l’avenir ils seront tentés d’adopter une loi d’exception pour imposer leur volonté. Ce serait beaucoup plus honnête de leur part de revenir à la bonne vieille méthode d’avant la Révolution tranquille  où la carte électorale était la chasse gardée de la classe politique ou bien encore, comme il se proposent de le faire éventuellement, de modifier la loi électorale afin qu’aucune circonscription rurale ne puisse être abolie même si le principe démocratique fondamental de l’égalité des votes est carrément bafoué.

 

Le poids politique des régions

Préserver le poids politique des régions, telle est la justification fournie par ceux qui s’opposent à l’abolition de circonscriptions rurales sous-peuplées. Ces gens se trompent en pensant que le maintien de distorsions inacceptables causées par une carte électorale boiteuse constitue une moyen efficace pour atteindre leur objectif. C’est une lubie de croire que quelques députés de plus peuvent faire la différence. La véritable solution réside plutôt dans la décentralisation régionale, telle que préconisée par le premier ministre Lévesque dès 1977.

 

Pour régler un problème aussi grave que la faiblesse politique des régions, il faut s’attaquer à sa racine: la concentration excessive des pouvoirs à Québec. L’État québécois, un des plus centralisés au monde, doit céder une partie de ses pouvoirs aux municipalités et aux MRC  qui ont été ses créatures jusqu’ici. Cette décentralisation doit prévoir que les instances démocratiques, locales et régionales, dont les membres seraient élus au suffrage universel, seraient dotées de pouvoirs et de revenus autonomes, ainsi que de mécanismes de péréquation. Ces dernières pourraient ainsi assumer l’ensemble de leurs responsabilités et assurer leur développement, ainsi qu’offrir des services de qualités à leur population.

 

Il s’agit là d’un projet de société exaltant. Souhaitons que  les Québécois, revenant à l’esprit de la Révolution tranquille, aient le courage politique de le réaliser.