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BUREAUCRATISER L’ENSEGNEMENT, QUELLE ERREUR!

02-09-2022

BUREAUCRATISER L’ENSEGNEMENT, QUELLE ERREUR!

par Michel Frankland

Les fonctionnaires en éducation s’étonnent de la pénurie de profs. Les deux causes majeures de cette situation catastrophique échappent aux fonctionnaires de l’éducation.

Première erreur, les fonctionnaires ne voient aucun problème à permuter les enseignants de classes, voire d’écoles. Cela ne se produit dans l’industrie ; les profs sont surement trop émotifs !

Au collège où j’ai enseigné, j’avais une bonne réputation comme prof. Il m’est arrivé deux fois d’avoir à remplacer un professeur pendant un cours. Une situation pénible !

Le fonctionnaire typique n’y comprend rien. L’enseignement implique un ensemble d’émotions profondes qui lie le professeur à ses élèves. Je ne peux imaginer un emploi qui suscite tellement de réactions complexes – sauf celui du comédien.

Mais justement, celui-ci ne performe qu’un soir devant un même groupe. Des adultes, précision capitale. L’enseignant doit gérer des êtres multiplement tiraillés par les impératifs divergents de la croissance. S’il s’enthousiasme pour sa matière et possède suffisamment un sens de l’autorité, nécessaire devant ses individus contrôlant souvent mal leurs émotions, il créera un bon rapport avec sa classe. Mais qu’arrive un suppléant pour un cours, nous ne sommes pas loin, souvent, de relations fort difficiles. Le tissu complexe des sentiments et impressions s’agite. L’image m’apparait parlante. Vous avez réussi à dompter un lion. Vous devez vous absenter une journée – bonne chance à la personne qui vous remplace !

Deuxième erreur : l’incompétence étudiante couronnée. Je n’ai pas une âme de fonctionnaire. Sûrement qu’il y a sur le lot des gens créateurs et responsables. Mais l’ensemble des fonctionnaires me semble correspondre surtout à gens « sérieux », qui ont bien rangé leurs émotions – « Ça prend des gens objectifs pour régler réalistement des problèmes humains » et autres adages étoignoirs –. Si bien qu’il convient d’ignorer l’idéalisme professoral et attribuer clairement plus de diplômes…

D’autant que les autorités politiques laissent entendre que les fonctionnaires doivent s’arranger pour que les profs sous leur administration doivent passer les esprits généralement faibles qui seront normalement récupérés par les gangs de rue. Plus on retarde ce passage au crime… Le message aux profs s’avère pervers : « Il est facile de réussir avec des jeunes suffisamment doués. Mais on va mesurer votre qualité d’enseignants au nombre d’étudiants plus difficiles qui passeront votre cours. »

On pourrait multiplier les exemples de diplômés incompétents, de professeurs de français qui s’égarent dans des fautes de français évidentes aux erreurs de logique affligeantes. J’ai entendu récemment un étudiant avouer : « Je termine mon secondaire 5, et je ne sais pas lire »

Évidemment, les professeurs perçoivent clairement le caractère affreux des slogans fonctionnaires. Devant autant d’incompétence, aux implications aussi exténuantes que stériles, on peut comprendre que plusieurs quittent l’enseignement.