« Le combat historique »
   Par Serge H. Moïse
       Durant mon séjour à Montréal j’ai appris avec une fierté certaine qu’il sera livré le vingt-cinq mai prochain, le combat historique de la boxe opposant les champions Lucian Bute d’origine roumaine et Jean Pascal, ce dernier d’origine haïtienne.
       La conférence de presse du vingt-six mars en cours était empreinte de gentilhommerie de part et d’autre, tranchant vivement d’avec ce à quoi on avait l’habitude d’assister en pareil cas.
       D’un côté, on a vu un Lucian Bute, calme et sûr de lui, très reconnaissant envers son adversaire d’avoir accepté de rompre des pourparlers avec un autre adversaire afin de répondre, disait-il, à l’attente de leurs milliers d’admirateurs québécois. Il se disait heureux d’être québécois mais très attaché à son pays d’origine d’autant que la communauté roumaine au Québec le soutient et l’encourage avec beaucoup de chaleur et de spontanéité.
       De l’autre, un Pascal Jean, jovial, souriant et affectueux, non moins sûr de lui, confiant en sa victoire prochaine et promettant avec conviction un combat historique.
       Je n’ai pu m’empêcher de constater la présence d’une journaliste d’origine roumaine parmi les membres de la presse, nombreux en la circonstance et anxieux d’interviewer les champions, alors que ceux de la communauté haïtienne semblaient briller par leur absence.
       Serait-ce une simple et malheureuse erreur de parcours ou le reflet de l’indifférence de la communauté tout entière vis-à -vis ses membres, même quand ces derniers se distinguent dans leurs sphères d’activités au point où la grande presse se fait le devoir de les traiter avec tous les égards qu’ils ont su se mériter.
       J’ose croire que je me trompe et que ce comportement de « crabes dans le panier » n’est qu’apparent, sinon c’en est fait de tous et chacun d’entre nous.
       L’indifférence des gens de bien fait plus de tort que la méchanceté des gredins. En effet, le moment est venu pour que les filles et fils de Dessalines et de Pétion, où qu’ils puissent se trouver se souviennent que la désinvolture n’est point une vertu et qu’il n’existe pas de véritable communauté en l’absence de cet indispensable ciment qui s’appelle « la solidarité ».
       L’indifférence, l’ignorance et l’intolérance sont les trois « I » qui conduisent à la dégénérescence individuelle ou collective. Je veux bien croire que je me suis trompé en ce qui concerne notre champion ou d’autres congénères qui se sont révélés des modèles, dans leurs champs d’activités respectifs, mais est-ce bien le cas?
       Et si je ne me suis pas trompé, de grâce, pour les générations futures, changeons vite de cap, débarrassons-nous de ces tares sociales, mettons de côté le « pito nou lèd nou la », faisons l’apprentissage de la convivialité, de la fraternité et la solidarité en résultera comme par enchantement, avec pour conséquences heureuses de constituer en fin de compte une communauté très organisée, un enrichissement pour la terre d’accueil et  de pouvoir véritablement contribuer à la refondation et à la reconstruction de la mère patrie.
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