Nature objective de la gauche et de la droite Réponse à Hureaux
Par Michel Frankland
Je vous avais laissés en vous référant au texte de Roland Hureaux. Si vous avez lu son texte remarquable, j’entends vous montrer qu’il se trompe remarquablement. Passons en revue ses affirmations telles qu’elles se présentent dans son article.
Dans cette première partie, nous analyserons les trois premiers des six volets passés en revue par Hureaux.
- Il rappelle d’abord l’affirmation assez explosive d’Élisabeth Badinter que seule Marine Le Pen défend la laïcité. Il en conclut : « Beaucoup risquent désormais de ne plus oser défendre la laïcité de peur d’être catalogués à droite[…]». Donc, infère-t-il, «Contrairement à ce que beaucoup pensent, il n’y a pas de valeurs politiques qui se rattachent intrinsèquement à la droite ou à la gauche, en dehors peut-être de ce qui touche au partage de la richesse[…]».
Saisissez-vous l’erreur ? Le propre de la droite est la primauté de l’individu sur le collectif. D’où l’expression des valeurs personnelles sur les valeurs collectives. Ainsi, Marine le Pen affirme la laïcité avec la même force qu’elle affirmerait sa foi si elle était croyante. Ce qui est en cause ici n’est pas la laïcité, mais l’affirmation par une personne de droite d’une valeur, qui s’adonne à être la laïcité.
Plus généralement, certaines valeurs, à cause de leur associations circonstancielles
à des valeurs plus profondes, adoptent une identification de gauche ou de droite.
- a)Il évoque l’histoire : « “Être patriote”signifiait en 1793 adhérer aux valeurs de la Révolution française contre les aristocrates.» Une des motivations de la Commune de Paris provenait de sa colère contre la droite parlementaire parce qu’elle avait fait la paix avec l’Allemagne. Mais un peu plus tard, le nationalisme bascule à droite (voir sur internet l’affaire Boulanger, Déroulède, Barrès), en particulier à cause de l’affaire Dreyfus – cet officier juif sur lequel un groupe d’officier racistes firent dévier des accusations qui se révélèrent plus tard sans fondement. La droite se trouve après cela associée au nationalisme.
Il n’y a ici qu’une contradiction apparente. La droite défend l’individu, le singulier. Ce qui est le plus proche d’elle. La vie concrète, de tous les jours. Elle commence, dans sa vision réaliste, à signer la paix avec l’Allemagne. Que cette signature ait été faite avec réalisme ou non, l’important c’est que la droite a cru agir avec bon sens. La raison, contre le cœur rouge de la gauche. Mais le nationalisme peut facilement être perçu par la droite comme les choses concrètes d’ici, versus les aspirations universalistes de la grande égalité humaine, analogué de la toile parmédienne.
De la même manière, «[…]le Front National, qui désignait l’extrême gauche en 1945, désigne l’extrême droite aujourd’hui.» La défense des langues régionales, en tant que considérée comme une marque concrète de la France, était identifiée à la droite, voire, précise Hureaux, à l’extrême-droite. Car les écoles de la République bannissaient les patois de la cour d’école. Mais aujourd’hui, ces langues, pratiquement disparues, parce qu’associées à l’écologie et aux valeurs à préserver, reçoivent l’assentiment de l’extrême gauche.
- b) L’homosexualité est-elle de gauche ou de droite ? Il signale qu’«[…]au début du XXe siècle, cultiver la différence homosexuelle était socialement assimilé à une certaine aristocratie décadente et donc à des opinions de droite ou d’extrême droite». Il rappelle les romans tout en pastel de Proust. Hureaux se demande donc par quel bizarre retournement l’homosexualité «[…]est-elle arrivée à être un des plus sûrs marqueurs de la gauche ?»
On remarque que les peuples plus masculins, ceux qui donnent à l’homme un rôle plus important, sont aussi ceux qui réussissent le plus dans les compétitions viriles mettant aux prises les hommes forts et leurs divers levers de poids. Ce sont en même temps ceux qui sont mal à l’aise avec l’homosexualité. Elle est d’ailleurs sévèrement punie chez certains peuples à la couenne dure. Symétriquement, le caractère d’exclusion qui affecte à des niveaux divers la communauté homosexuelle attire la compassion naturelle de la gauche.
Vous comprenez de plus en plus clairement la confusion à la racine même de la pensée de Roland Hureaux sur le prétendu caractère aléatoire de la gauche et de la droite.
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