LE VÉRITABLE PROBLÈME DES RÉSERVES AMÉRINDIENNES
par Michel Frankland
 Commençons l’évaluation des réserves par la citation suivante :
Ceux qui perçoivent les réserves de cette manière estiment parfois que, sans elles, les Autochtones seraient forcés de s’assimiler à la société canadienne et qu’ainsi, nombre des problèmes actuels de ces populations disparaîtraient. Ce point de vue ne tient pas compte du statut juridique et politique des réserves au Canada ni du fait que les Autochtones préfèrent ne pas être assimilés. 1
Ce qu’implique cette citation s’avère une carence démocratique assez grave. La nette préférence de la majorité en vue d’un bienfait objectivement valable est contrecarrée par un statut juridique ! Ce réflexe dictatorial, l’histoire nous en a donné plusieurs exemples. Staline affirmait qu’il n’avait pas de problèmes à ce que les chrétiens fréquentent l’église… dans la mesure où les lois le permettaient. Mais justement, les lois ne le permettaient pas !
De même pour le chemin Roxham . Plus de 37 000 demandeurs d’asile ont traversé la frontière canado-américaine de façon irrégulière en 2017 et en 2018 2. Or, ce chemin constitue un passage illégal. Mais le Gouvernement le garde ouvert quand même. Ici, la variante entre le désir légitime du peuple québécois de contrôler son immigration et le pouvoir politique d’abolir le plus possible ce contrôle consiste dans la validation factuelle d’une mesure illégale.
Les réserves sont à la fois un non-sens et un anachronisme. En 2016, nous rappelle l’Encyclopédie Canadienne, seulement 44,2 % des autochtones vivaient sur une réserve. C’est donc que plus de la moitié d’entre eux ne tiennent pas particulièrement à conserver officiellement leurs coutumes. Au sens où d’autres peuples venus ici. Les Allemands sont fiers de leur origine germanique. Les Arméniens, de leur Arménie natale. Ils fêteront leurs racines peut-être une fois ou deux par année. De même pour le 56 % d’Inous hors réserve.
La réserve souffre de quatre maux majeures. D’abord, de vouloir, il y a plus d’un siècle, chercher à concentrer un peuple dans des espaces circonscrits. Une espèce de « prison douce » Pour leur bien ? Était-ce pour leur bien qu’on a découvert dans l’ouest canadien des cimetières de jeunes autochtones assassinés et parqués sous terre dans un même lieu ? Bref, cette concentration recèle plutôt le goût du contrôle.
Le deuxième vice majeur des réserves tient au despotisme qu’elle suscite. Précisons tout de suite que cela n’est pas forcément le lot de toutes les réserves. Mais c’est assez fréquent pour que des journalistes le signalent périodiquement. Le chef prend la majorité des sommes allouées par le Fédéral à sa réserve et la dépense dans les casinos – à Montréal, à LasVegas ou ailleurs. Les simples membres de la réserve ont intérêt à ne pas protester ! Bref, une tendance fréquente à la dictature.
Mais le danger majeur des réserves tient dans son commerce illicite d’armes et de drogues, généralement celles carrément illicites. Les agents de contrôle ne sont pas bienvenus sur la réserve. À Kanesatake, il y a une ou deux décennies, des policiers québécois devaient appréhender un Mohawk au lourd passé qui s’était permis une autre infraction clairement établie. Ils furent éconduits cavalièrement hors réserve. Mais d’abord humiliés en les obligeant à demeurer sur place un bon moment. Comme l’a formulé un journaliste, le pire criminel de la place est peut-être le cousin d’un policier de la tribu. De même, les employés d’Hydro-Québec vérifiant les compteurs et autres gréements électriques furent l’objet de multiples contusions. On ne s’aventure pas facilement dans un milieu qui pratique de multiples illégalités.
Enfin, les réserves s’avèrent un obstacle périlleux à l’accession du Québec à l’indépendance. Pour les Autochtones, c’est le Fédéral qui a créé les réserves et les soutient économiquement. Pour eux, une grande partie du territoire leur appartient – en partenariat avec le Fédéral. Et voilà qu’un autre peuple veut en prendre possession ! On s’imagine le Fédéral jouant les pacificateurs – se donnant le beau rôle, avec les bénéfices politique collatéraux, et au fond mort de rire devant le Québec qui en prend pour son rhume. Denise Bombardier interviewe un Mohawk modéré . « Vous viendrez pas me dire que l’ile de Montréal vous appartient ! – Non, elle appartient aux Alkquonquins. Un inou pondéré pourtant !… En somme, le Québec fera face à des océans d’émotion, où les conflits armés surgiraient vraisemblablement. Comme le note Harari, « NE JAMAIS SOUSESTIMER LA BÊTISE HUMAINE 3, surtout lorsqu’elle est convaincue que des droits fondamentaux lui sont enlevés !
Bref, au lieu de chercher toutes sortes d’ententes fleuries avec les Autochtones, supprimons un élément fondamental, multiple source de conflit, auquel d’ailleurs la majorité des Autochtones ne croient plus vraiment. Supprimons d’abord les réserves.
2 Radio-Canada, 10 juillet 2021
3 Yuval Noah Harari, 21 leçon pour le II’ siècle, p. 189, Albin Michel, 375 p. 2018