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Justin Trudeau et les pipelines : le mauvais pari

02-12-2016

Justin Trudeau et les pipelines : le mauvais pari

 

par Louise Morand

En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau va à l’encontre des recommandations des scientifiques, experts des changements climatiques et de la transition énergétique, qui répètent à satiété que si l’humanité veut éviter un emballement incontrôlable de la température terrestre, avec tous les impacts associés sur la biodiversité et l’économie, les réserves connues d’hydrocarbures doivent rester dans le sol. Cela inclut les réserves de charbon, de gaz et de pétrole du Canada et des États-Unis. En bref, aucune nouvelle infrastructure de transport ou d’exploitation d’hydrocarbures ne devrait voir le jour, alors que les pays industrialisés disposent de 10 à 15 ans pour éliminer leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau fait le pari que l’argent du pétrole servira à financer la transition énergétique. C’est en tout cas ce qu’il veut donner à croire aux citoyens. Cet argument ne tient pas la route lorsqu’on considère que les effets des GES sont cumulatifs. Au point où nous en sommes, la seule façon de faire la transition énergétique est de freiner radicalement les émissions. Faut-il rappeler qu’au-delà d’un certain seuil de saturation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, la Terre se réchauffera toute seule par la perte du couvert de glace et le dégazage du méthane provenant de la fonte du pergélisol. Ce phénomène est déjà bien amorcé dans l’Arctique et plusieurs scientifiques pensent que la bataille est déjà perdue pour l’humanité. En approuvant deux nouveaux projets de pipeline, Justin Trudeau fait peut-être le pari que les citoyens formeront un mur sur le terrain pour empêcher les travaux de se réaliser, comme on le voit présentement avec le pipeline Dakota Access aux États-Unis. Plus de 5000 personnes occupent le terrain pour empêcher les bulldozers d’avancer. Les opposants font face à une petite armée privée qui tente de les déloger. Après avoir satisfait les riches contributeurs de son parti, Trudeau pourrait toujours se rabattre sur le manque d’acceptabilité sociale pour finalement laisser les tribunaux donner gain de cause à ceux et celles qui veulent protéger leur eau, leurs terres agricoles, et les conditions pour la survie de leurs enfants et petits-enfants. Une chose est certaine : celui qui s’est fait élire comme chef du gouvernement canadien en promettant que l’analyse des projets de pipelines tiendrait compte de la science ne peut pas ignorer l’urgence de la transition énergétique. En refusant d’imposer un moratoire sur tout nouveau projet de développement des sables bitumineux, Trudeau fait preuve d’un manque total de leadership. Il laisse aux seuls citoyens le fardeau de la lutte contre les énergies fossiles. Comme l’empereur Néron jouant du violon pendant que Rome brûle.